L’aquarelle et le blanc, une histoire d’amour passionnée. Pour révéler son éclat précieux et faire scintiller les couleurs, le blanc doit se comprendre, s’anticiper, se travailler.
Pauline avait envie de nous en parler. L’aquarelle est son activité artistique favorite, elle la pratique tous les jours dans son atelier, l’applique dans ses œuvres, et en parle dans de nombreux articles qui facilitent l’apprentissage de cette technique. Son site est d’ailleurs super intéressant et il toujours plein de surprises. (si si et je vous invite à lire la fin de l’article)
Allez, je me retire et je vous laisse entre les pinceaux de Pauline.
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Dans l’intimité de l’aquarelle avec Pauline
“Quand on démarre la peinture à l’aquarelle, une des premières difficultés à laquelle on se trouve confronté est le BLANC : cette couleur n’existe pas pour ce médium !
D’une façon générale, cette couleur – ou plutôt cette absence de couleur – est gérée par le papier lui-même sur lequel on évitera d’appliquer des pigments sur des zones choisies.
Pour autant, il existe divers moyen de pouvoir gérer le blanc en aquarelle et dans cet article je vous en présente 6.
Mais avant ça, voyons un peu ensemble ce qu’est le blanc et comment celui-ci est utilisé.
Le blanc, couleur ou absence de couleur ?
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Le blanc ||| Source de lumière.
Quel que soit votre style, figuratif ou abstrait, quel que soit le sujet que vous allez représenter, vous serez à un moment confronté à l’utilisation de la couleur blanche. Souvent, dans une oeuvre, le blanc pur est source de lumière et permet de venir contraster une zone, de mettre en valeur une couleur, un détail ou une forme.
Le blanc n’est pas non plus un indispensable : la lumière peut également émaner des couleurs avec des valeurs claires qui viendront jouer le contraste avec celles ayant des valeurs foncées.
La difficulté à l’aquarelle est bien de déterminer avec justesse la zone parfaitement blanche, qui apportera la lumière à votre création dans son ensemble. Cette zone-là doit être protégée.
Un des meilleurs moyens pour cela est de peindre en allant du clair au foncé, moyen plébiscité en général par les artistes aquarellistes. Ce n’est pourtant pas une obligation et personnellement, je ne la respecte pas toujours. Mais lorsqu’on est débutant, c’est une bonne façon de faire évoluer son aquarelle en augmentant progressivement ses valeurs. Cela permet de faire ressortir ses zones blanches, éventuellement de les corriger et de les atténuer, et de voir sa création prendre forme avec d’avantage de précision.
N’oubliez pas que, en aquarelle, le blanc est partout, même sous la couleur. Il émane de votre papier et l’aquarelle étant une technique transparente, cette source de lumière s’appliquera également à vos zones de couleurs. D’une certaine façon, le blanc de votre papier fusionne avec votre pigment et cela peut créer de jolis dégradés lumineux.
Le blanc ||| Est-il vraiment blanc ?
Savoir si votre blanc est réellement blanc est une question qui va venir s’appliquer plus particulièrement sur des œuvres figuratives. Elle relève de l’analyse de votre sujet.
Par exemple, vous peignez un paysage enneigé. Théoriquement, la neige est blanche. Seulement, dans la représentation et dans l’analyse de votre sujet, vous pouvez sûrement observer que ce blanc que vous voyez vient prendre des nuances qui n’ont rien à voir avec un blanc pur. Des ombres sur la neige seront illustrées par des nuances de bleu et de violet, alors que peut être des reflets ou des sources lumineuses donneront des nuances légèrement jaune, tirant vers de l’orangé ou du rouge voir carrément d’autres couleurs.
A vous de voir, selon votre création, votre sujet et votre style si les zones blanches identifiées sont réellement blanches. Les blancs colorés peuvent être nombreux et apporteront d’avantage de réalisme ou de style à votre peinture. Il peut être utile en revanche de protéger ces zones blanches dès le départ et de les colorer légèrement après coup pour améliorer le rendu !
Le blanc ||| 6 techniques pour y parvenir.
J’ai identifié ici 6 techniques pour gérer le blanc à l’aquarelle. Chacune d’elles présente des avantages et des inconvénients et va s’appliquer parfois selon un type de sujet, ou même encore selon vos propres préférences ou le rendu que vous souhaitez obtenir.
1- Réserver naturellement les blancs
Le moyen le plus courant pour gérer le blanc à l’aquarelle est simplement d’identifier et « réserver » les zones blanches en évitant de peindre dessus.
Vous faites votre croquis au préalable, et en commençant à peindre vous contournez les zones blanches que vous laissez bien au sec.
Avantage :
- Un rendu naturel sans aucun risque d’abîmer son papier.
Inconvénients :
- Délicat pour des zones de détail, cela peut demander beaucoup de concentration et un bon coup de pinceau
- Si jamais on fait une erreur, il est compliqué voire parfois impossible de la corriger mais de toute façon, c’est une règle général à l’aquarelle donc vous êtes habitué.
- Difficilement applicable si vous peignez en technique humide
2- Utiliser du liquide à masquer ou drawing gum
Le liquide à masquer est une pâte liquide qui une fois appliquée sur papier, sèche et permet de protéger une zone. Pour l’application, je vous conseille d’utiliser un vieux pinceau dédié et qui ne sert plus par ailleurs : le liquide à masquer abime les poils, se colle partout et est difficile à retirer.
Vous pouvez aussi utiliser d’autres outils pour ça, comme un art-modelleur (facile à nettoyer et aucun risque de le rendre inutilisable) ou encore une plume pour des détails fins.
Certains flacons de drawing gum disposent aussi d’un applicateur. Attention en revanche, l’applicateur peut se boucher assez facilement…
Une fois le liquide à masquer appliqué sur les zones que vous souhaitez réserver, il suffit d’attendre qu’il sèche avant de peindre.
Une fois que vous avez terminé votre création – la peinture doit être bien sèche, essuyez les parties de drawing gum sur lesquels il y a de l’eau et des pigments avec un papier absorbant, puis retirez-le en frottant avec votre doigt.
Avantages :
- Aucun risque de contaminer vos zones blanches qui resteront parfaitement intactes.
- Peut être utilisé aussi bien pour des détails que pour des zones plus grandes.
Inconvénients :
- Des démarcations parfois trop franches et qui obligent à retravailler la zone pour adoucir
- Risque minime d’abimer le papier lors du retrait du drawing gum
- Sur des zones étendues, le frottement avec les doigts pour le retrait du liquide à masquer peut être douloureux (une fois, j’ai réussi à me créer une ampoule…) – certains liquide à masquer sont plus faciles à retirer selon les marques.
3- Faire des ouvertures ou retrait de pigments
Après avoir peint une zone et tant que celle-ci est encore humide, vous pouvez faire ce qu’on appelle « Ouvrir un blanc ». Pour cela, il suffit de passer votre pinceau propre et légèrement imbibé d’eau sur la zone concernée. Les pigments vont alors être poussés par l’eau propre vers l’extérieur. Pour plus de netteté, vous pouvez repasser votre pinceau propre et le moins humide possible sur la zone. Cela aura pour effet d’absorber l’eau et les pigments restant.
Avantage :
- La douceur et la légèreté du rendu.
Inconvénients :
- Le blanc du papier apparaît rarement pur, il s’agit plus d’un moyen pour éclaircir une zone
- Il faut parfois revenir plusieurs fois sur la zone, cela dépend du degré d’humidité ou même de la qualité de votre papier
- Si on ne le fait pas au bon moment, c’est raté. Trop tôt, le blanc disparait. Trop tard, les pigments sont secs et impossible à retirer. Il faut bien connaitre son papier pour ce genre d’exercice et maitriser l’humidité. Un conseil : entraînez-vous !
4- Frotter les zones avec de la cire
Oui, vous pouvez utiliser une bougie pour créer des effets et des réserves de blanc ! Cette technique est notamment utilisée pour les reflets intenses qu’on peut parfois observer sur la mer.
Pour réaliser cette réserve, rien de plus simple : il suffit de frotter la bougie à l’endroit désiré.
Cette méthode reste cependant aléatoire et je vous conseille de la tester avant de l’appliquer. Par ailleurs, il sera difficile de voir les zones et de distinguer ce que cela va donner avant d’avoir peint dessus, donc entraînez-vous.
Vous pouvez éventuellement enlever la cire après avoir peint : placez du papier absorbant sur la zone et repassez par-dessus avec un fer tiède ce qui aura pour effet d’absorber la cire.
Avantages :
- Permet de créer plein de petites zones blanches de façon hétérogène
- Un rendu peu travaillé, plus spontané et vivant
Inconvénients :
- Tant que les pigments ne sont pas appliqués, difficile de savoir ce que ça va réellement donner.
5- Retirer les pigments avec un cutter
C’est sans doute le moyen le plus risqué pour créer des zones blanches. Avec un cutter, il suffit de gratter le papier aux endroits où vous souhaitez retirer des pigments. A ne pas utiliser sur des zones étendues, évidemment. En revanche, pour des détails genre moustaches de chat, ça peut être bien, ou alors encore un petit point lumineux manquant. Attention d’avoir la main légère pour ne pas déchirer votre papier.
Avantages :
- Précision et finesse du trait
- On fait à nouveau apparaître le papier et on obtient un « vrai blanc ».
Inconvénients :
- Risque d’abimer voire de déchirer le papier
- A réaliser avec parcimonie uniquement pour des détails
6- Gouacher avec du blanc de titane ou du blanc de chine
Les purs et durs de l’aquarelle rejette souvent cette méthode. Pourtant, elle a notamment été utilisée à multiples reprises par William Turner, qui en plus de ça, n’hésitait pas à carrément mélanger la gouache avec les pigments d’aquarelle – véridique, j’ai constaté ça en voyant plusieurs de ses aquarelles exposées à Aix-en-Provence à la fin de l’été dernier.
Et puis honnêtement, quand des moyens sont à notre disposition et qu’on en a besoin, pourquoi s’en priver ?
Le blanc de chine est transparent, il est idéal pour éclaircir des zones et être utilisé en glacis.
Le blanc de titane est opaque et vous permettra de créer des zones de lumières totalement blanches.
Pour les deux, il faut parfois revenir plusieurs fois sur la zone en fonction de la capacité d’absorption de votre papier.
Avantage :
- Technique idéale pour apporter des corrections et des zones de lumières une fois l’aquarelle terminée.
Inconvénient :
- Dans le temps et selon la qualité de la peinture utilisée, un risque de jaunissement est possible. J’ai déjà vu des aquarelles ayant quelques années et où le blanc avait jauni.
En conclusion
Je conseille d’une façon générale d’utiliser un maximum le blanc du papier, votre aquarelle n’en paraîtra que plus réussi. Mais n’hésitez pas à recourir à ces divers moyens quand vous en avez besoin. Par ailleurs, avant de peindre, prenez également le temps de réfléchir à la façon dont vous souhaitez gérer vos blancs et quelle sera la meilleure méthode pour ça.
Faites preuve d’imagination ! J’ai identifié ici 6 techniques pour le blanc en aquarelle, mais déjà je peux en imaginer d’autres que je n’ai pas forcément testées personnellement, comme par exemple l’utilisation de pochoirs.
Avez-vous une technique à vous qui ne figurerait pas ici ? Échangez avec nous dans les commentaires !”
Texte et photos par Pauline de PaulineArtGallery.com
@devère: Merci pour tous ces precieux partages !! C’est Noël avant l’heure, on dirait ! 🙂
autre chose :
astuce infaillible pour le drawing gum : enduire, secs, les poiles et le métal de vos pinceaux de liquide vaiselle puis assécher au p-q, j’utilise même mes pinceaux fétiches j’ai jamais eu de problème !
vous pouvez même diluer legerement le drawing-gum ça évite le peluchage du papier
salut ! j’ai d’autres techniques de réserves à te suggérer , après nombres expérimentations :
1. l’eau de javel: c’est la technique la plus direct pour retrouver le blanc de votre papier, une fois bien sec (séche-cheveux) vous pouvez peindre à l’intérieur de vos nouveaux blancs. si votre recoloration disparait, il y a dépôt de chlore, humidifier la zone, tamponner au papier-q,recolorer… et rajouter un shouyas d’eau dans votre javel pour ne plus avoir à le refaire. Vous pouvez la diluer pour avoir différent effet . ça respecte carrément plus le papier que la gomme à réserver sur papier aquarelle. vu que c’est chimique, utiliser-la dans de petites quantités genre verrine.
2. le ruban à masquer, ruban de peintre, vinyle adhésif transparent(sticker) : utile pour faire des grandes formes précise à réserver.
premièrement, préparer votre forme, sur papier-cuisson décalquer ou tracer votre forme au crayon à papier gras de préférence .
Si vous utiliser du Ruban à masquer :recouvrer l’endroit de votre dessin de ruban à masquer, avec une petite régle en plastique ou avec vos doigts, maroufler bien.
Découper la forme en suivant le tracer à l’envers. ciseaux ou à la lame de précision
option stickers : même chose, maroufler bien votre vinyle sur l’endroit du dessin-papier cuisson avant la coupe.
Séparer les deux feuille, appliquer la forme adhésive, maroufler racler les bord, les jonctions pour celui à bandes. vous pouvez enfin peindre vos lavis etc… une fois le tout sec, passer un bon coup de séche cheveux puissance max sur la forme puis décoller.. ou décoller tout en envoyant la chaleur sur l’adhésif .. s’il y a des dépôt de colle frotter avec le doigt
pour la technique à la cire on peut aussi la chauffer au micro onde une minute, en retirant la meche et le support en alu. le pinceaux doivent etre tremper dans du white spirit ou du liquide vaiselle puis asséché avant utilisation.
on peint à la cire. aprés séchage gratter la cire et repasser le dessin au fer à repasser en mettant entre-deux deux feuilles de saupalin.
@Amylee : je la connaissais pas, j’aime beaucoup aussi ! Je me la note 😉
@Elize et Pauline: Et comme dirait Kandinsky : “Le blanc sonne comme un silence, un rien avant tout commencement…” J’aime beaucoup cette phrase 🙂
Hello Elize,
En effet c’est un exemple amusant de réserve de blanc très inspiré 🙂
Pour le blanc, la différence essentielle avec les autres médiums, c’est que comme tu utilises le blanc du papier, une fois que celui-ci est coloré, normalement c’est impossible de corriger. Difficile donc de tester, ou d’ajouter des rehauts de lumières sur une création avancée comme on peut le faire avec d’autres médiums.
Après, les différentes techniques expliquées sont là pour envisager des alternatives et justement, pouvoir faire de petites modifications quand c’est nécessaire 🙂
Merci pour ton com 😉
Pauline
Merci Pauline et Amylee pour cet article.
Le blanc, c’est toute une histoire, même dans les autres médiums, j’ai pour ma part beaucoup de mal à l’utiliser en général.
Et finalement, malgré la difficulté, c’est à l’aquarelle qu’il trouve le plus facilement sa place.
J’avais abordé le sujet des réserves de blanc, avec mes filles quand on avait peint la neige.